jeudi, novembre 14, 2024
Le Musée du Louvre

Depuis sa  création, le service de l’éclairage public de la ville de Paris avait pour mission : l’éclairage des rues, la maintenance des carrefours de signalisation (feux rouges) et les illuminations des monuments. Au fil des années, des ouvrages laissés dans la pénombre, se virent dotés, soit en rénovation, soit en pure création d’un éclairage mettant en valeur leur architecture (60 monuments en 1960, 250 en 2000).

Ainsi un très grand nombre de monuments vinrent confirmer à Paris le qualificatif de ville Lumière. Hélas, un des plus célèbres sites et un des plus visité restait dans l’ombre la nuit tombée : le Musée du Louvre. Si les façades extérieures (quai des Tuileries, quai du Louvre, rue de l’amiral de Coligny), étaient éclairées de manière conventionnelle par des spots, les façades intérieures de la Cour Carrée et de la Cour Napoléon, là où l’architecture était la plus belle, il n’y avait rien !

En 1983 l’Etablissement Public du Grand Louvre (EPGL) fut créé pour gérer l’ensemble des gros travaux, la construction de la pyramide inaugurée en mars 1989 et la rénovation de l’aile Richelieu débutée en 1983, et inaugurée le 18 novembre 1993. C’est pendant cette période que l’EPGL se rapprocha du service de l’Eclairage Public, pour un projet de mise en lumière des façades intérieures du Louvre, mais la Cour Carrée et la Cour Napoléon ne dépendaient pas de la Ville de Paris. C’est donc EDF qui proposa un mécénat avec lequel démarra ce projet en septembre 1992.

Le projet ainsi que les essais devaient être faits en collaboration avec l’EPGL mais aussi avec la direction du musée et notamment M. NICOT architecte en chef des monuments historiques de cette période. Notre premier projet était basé sur des projecteurs au sol et sur chaque corniche en contre-plongée comme sur la plupart des autres monuments à l’époque. La première présentation fut plus qu’une déception pour nous puisque M. NICOT désirait un éclairage en plongée comme la lumière du soleil et surtout qu’aucun projecteur ne soit visible de jour. Il nous fallait donc intégrer l’appareillage. Il nous fallait concevoir un appareil éclairant en plongée et suffisamment réduit  en épaisseur pour se confondre avec le profil des corniches. L’utilisation de lampes halogènes dichroïques fut envisagée, la taille réduite, plusieurs angles d’éclairage, plusieurs puissances de ces lampes, semblaient adéquates pour ce projet. 
Un premier prototype fut créé (ci-dessous en présentation au service de la communication d’E.D.F). En partant de cette idée nous pourrions proposer à M.NICOT de faire un essai sur le « Pavillon SULLY » l’un des endroits des façades le plus beau mais aussi le plus délicat à mettre en valeur.
Après plusieurs semaines en atelier, la fabrication et l’équipement d’appareils provisoires furent achevés. La pose et le câblage, furent entrepris puis des réglages de nuit nous permirent, en jouant sur la puissance, de moduler l’éclairage en fonction des surfaces entre deux corniches, du relief et de la couleur de la pierre qui peut offrir des nuances différentes d’un endroit à un autre.

C’est donc après plus d’un mois de travaux et d’essais que nous présentions à l’Architecte en chef des monuments historiques le projet.

Si l’éclairage, le ton de la lumière, le relief mis en valeur étaient satisfaisants, restaient deux points qui bloquaient : d’une part la grosseur des appareils afin qu’ils puissent se confondre dans l’épaisseur des corniches et d’autre part la durée limitée des lampes (2000 heures) qui aurait obligé à intervenir fréquemment avec des élévateurs dont la location est onéreuse.

M.NICOT nous laissa alors entendre que si nous arrivions à résoudre ces problèmes, notre éclairage étant lui très satisfaisant, les travaux pourraient bien nous être confiés. La mission était simple, concevoir un appareil de dimensions réduites se confondant dans l’épaisseur des corniches afin d’êtres non visibles de jour.

Un prototype fut fabriqué en collaboration avec la société AGABEKOV déjà spécialisée en éclairage décoratif d’intérieur. Les lampes utilisées étaient au xénon de puissances de 5 W et 8 W en 24 V . Ces deux puissances permettaient, avec en plus des gradateurs, d’éclairer de la même manière l’ensemble des façades quelque soit le relief ou le ton de la pierre. Puis les appareils furent perfectionnés : réflecteurs, étanchéité et grilles de défilement (pour rabattre la lumière vers la façade et être moins visible par le visiteur).

Le premier ouvrage fut terminé en septembre 1993, la façade « Sully » de la Cour Carrée dont l’architecte en chef approuva la résultat et donna ainsi son feu vert pour la réalisation complète de la Cour Carrée, puis ensuite celle de la Cour Napoléon.

Dès la fin des travaux de la première façade, la presse étant présente lors de l’inauguration, EDF et CITELUM furent sollicités pour réaliser des illuminations dans différentes villes (le Palais Princier de Monaco, la Place Stanislas à Nancy, l’hôtel Sheraton à Addis-Abeba, le Palais de l’institut à Paris).

En 2013, près de 30 ans après la première mise en lumière du site, le Musée du Louvre a fait appel à la société Toshiba pour moderniser l’installation, laquelle a conservé exactement la même façon d’éclairer les façades mais avec des réglettes équipées de « leds ». Grâce à cette nouvelle technologie, la consommation a été réduite de 73% ce qui est considérable. Reste à voir sur place si l’éclairage du Musée du Louvre est aussi joli qu’avant …

Claude Niogret

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